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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 09:45

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous proposerai deux séries de réflexions.

La première concerne les travaux de la commission d’enquête et les recommandations qu’elle a adoptées à l’unanimité.

Ces recommandations sont de nature à inverser la tendance et à refuser le fatalisme de la désindustrialisation. Encore faudrait-il que les acteurs concernés s’en saisissent, à commencer par l’État et la SNCF, car le temps presse.

Tous ceux qui viennent de s’exprimer l’ont dit, il est urgent, devant la situation alarmante du fret, de sauvegarder la maîtrise que possèdent nos entreprises ABRF ou AFR Titagarh.

Il est urgent de donner un souffle nouveau au fret pour se mettre en accord avec les orientations du Grenelle de l’environnement grâce à une politique de grande ampleur. Et il est urgent de revenir sur la décision catastrophique annoncée au mois de juillet 2009 par la SNCF d’abandonner la pratique du wagon isolé.

Il est urgent, enfin, devant les difficultés des équipementiers et des sous-traitants, de créer les conditions pour sauvegarder une industrie qui risque de disparaître en partie. C’est vrai, en particulier, dans une région qui nous est chère, à Alain Bocquet et à moi-même, le Nord-Pas-de-Calais, capitale ferroviaire de notre pays et de l’Europe occidentale. C’est tout le sens du projet de pôle ferroviaire industriel régional qui a pour objectif de créer une filière innovante et stable grâce à une synergie entre les constructeurs et les sous-traitants.

Ma deuxième série de réflexions concerne les Assises du ferroviaire que le Gouvernement a lancées à la mi-septembre. Si nous voulons que le débat aille au fond du problème et qu’il soit utile, la question de la pertinence de l’ouverture à la concurrence doit être posée, comme l’a dit Alain Bocquet. Or ce n’est pas le cas jusqu’à présent. Dans ces conditions, nous pouvons craindre que les conclusions de ces assises ne soient déjà écrites et qu’elles n’aboutissent à l’idée que l’ouverture à la concurrence est inévitable.

Je profite de cette tribune pour interroger le Gouvernement sur les graves menaces que représente la refonte en cours du premier paquet ferroviaire européen. Le mandat est désormais donné à la commission de Bruxelles de proposer en 2012 un texte législatif introduisant la libéralisation totale du trafic de voyageurs.

Le premier train privé de voyageurs entre la France et l’Italie arrivera sur les rails français dans quelques jours. À cette occasion, je tiens à souligner l’opposition résolue de notre groupe à toute privatisation des chemins de fer. Je rappelle également que, pour nous, une politique volontariste passe évidemment par la maîtrise publique des choix d’investissement et de financement, mais aussi par un renforcement des moyens matériels et humains.

La question posée, et qui devrait être au cœur des Assises du ferroviaire, est celle de l’enjeu de ce service public. Il s’agit de permettre à la filière de répondre aux besoins des populations tout en prenant en compte les exigences écologiques. Cela suppose un report modal massif de la route vers le rail, un schéma national d’infrastructures multimodal et de nouvelles lignes de TGV, mais aussi un plan ambitieux de régénération et de modernisation du réseau secondaire, ce qui créerait des débouchés importants pour notre industrie.

C’est de cette manière, par des choix en matière d’investissements et d’infrastructures, que le service public pourra être à la hauteur de la situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

 

- Assemblée Nationale, séance du mercredi 7 Décembre 2011 -

 

 

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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 09:38

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour le groupe GDR.

M. Marc Dolez. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de la santé, mes chers collègues, vingt-cinq ans après l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, la proposition de résolution de nos collègues du groupe SRC entend faciliter l’indemnisation des victimes en invitant le Gouvernement à établir un principe de « présomption d’un lien de causalité entre, d’une part, la ou les maladies affectant toute personne résidant sur un territoire ayant été, de manière significative, contaminé du fait d’un accident nucléaire et, d’autre part, l’accident nucléaire ».

Cette proposition de résolution s’inscrit dans un vaste mouvement de prise de conscience des difficultés que rencontrent les victimes d’essais ou d’accidents nucléaires pour obtenir l’indemnisation à laquelle elles peuvent légitimement prétendre.

Ces dernières années, à l’Assemblée nationale et au Sénat, cette prise de conscience s’est traduite par le dépôt de nombreuses propositions de loi et propositions de résolution demandant de création d’une commission d’enquête. Elles ont été présentées par presque tous les groupes politiques. Pour notre part, nous avons déposé deux propositions de loi, l’une en 2002 et l’autre en 2008, relatives au suivi sanitaire des essais nucléaires français.

S’agissant des victimes des essais nucléaires, la loi du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes a, malgré tout, permis certaines avancées. A ainsi été introduite une présomption simple de causalité entre la maladie et les essais nucléaires, lorsque les conditions d’indemnisation prévues par la loi sont réunies. Le renversement de la charge de la preuve qui est ainsi opéré constitue une amélioration pour les victimes, même si, comme vient de le rappeler M. Giacobbi, les décrets d’application viennent malheureusement réduire l’efficacité et l’impact de cette loi.

L’indemnisation des victimes d’accidents nucléaires se heurte toujours à des procédures complexes et inadaptées. S’agissant des victimes des conséquences de Tchernobyl, il convient de rappeler que la Cour de justice de la République avait classé sans suite la plainte d’une victime atteinte d’un cancer de la thyroïde lié, selon la personne malade, au passage du nuage de Tchernobyl en France, en 1986. Cette plainte visait cinq anciens ministres. La victime leur reprochait de ne pas avoir été suffisamment informée, au même titre que l’ensemble de la population, des risques entraînés par l’explosion du réacteur 4 de la centrale ukrainienne. Toutefois, la commission des requêtes de la Cour de justice a rendu le 23 octobre 2003 une décision de classement non susceptible de recours. Cette décision était motivée par l’absence de « lien de causalité scientifiquement démontré » entre le passage du nuage de Tchernobyl au-dessus de la résidence de la victime et la maladie dont elle a été reconnue atteinte en 2000.

M. Claude Leteurtre. C’est évident !

M. Marc Dolez. De manière générale, lorsqu’on examine les arrêts rendus par les différentes juridictions, on s’aperçoit qu’à défaut d’expertises médicales solides et pertinentes les demandes sont rejetées systématiquement.

L’arrêt du 19 mars 2008 rendu par la cour administrative d’appel de Paris précise ainsi que, quand bien même « les autorités administratives françaises auraient commis, dans la gestion de la crise sanitaire résultant du passage sur la France en 1986 du nuage radioactif provenant de l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, une faute de nature à engager la responsabilité de l’État », le lien causal doit être démontré par les intéressés entre leur pathologie et le passage du nuage radioactif.

L’impossibilité dans laquelle se trouvent les victimes de démontrer ce lien de causalité a une nouvelle fois été illustrée par le non-lieu général rendu, le 7 septembre 2011, par la cour d’appel de Paris dans l’enquête ouverte en 2001 sur l’impact du nuage de Tchernobyl en France. Comme le requérait le ministère public, la cour d’appel a considéré que les analyses scientifiques versées au dossier s’accordaient pour établir que la catastrophe nucléaire de 1986 n’avait pas eu de conséquences sanitaires mesurables en France ; en particulier, aucun lien n’a été établi avec des maladies de la thyroïde.

Les associations, en particulier l’Association française des malades de la thyroïde, qui a formé un pourvoi en cassation, dénoncent cette décision, dans laquelle elles voient à juste titre un véritable déni de justice.

Considérant qu’il est grand temps d’adopter une législation permettant d’inverser la charge de la preuve en faveur des victimes d’accidents nucléaires, les députés communistes, républicains et du Parti de gauche voteront cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

  

- Assemblée Nationale, séance du mercredi 7 Décembre 2011 -

  

  

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28 novembre 2011 1 28 /11 /novembre /2011 09:45

Ci-après l’interpellation de Marc DOLEZ sur les suppressions d’emplois lors de la séance des questions au gouvernement du mercredi 23 Novembre 2011.

 

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Marc Dolez. Monsieur le Premier ministre, la mise en garde de ce grand quotidien économique français est particulièrement éloquente : « Il ne faut pas prendre à la légère les récentes réductions d’emploi de PSA Peugeot Citroën, BNP Paribas ou la Société générale. Ce sont les premiers signes concrets du chaos de la zone euro. »

En effet, pour rassurer les marchés financiers et les agences de notation, ces trois grandes entreprises viennent d’annoncer la suppression de milliers d’emplois. Les banques font payer à leur salariés le prix de la folie spéculative d’un système devenu opaque et incontrôlable ; alors que ses bénéfices ont progressé de 18 % au premier semestre, PSA supprime plus de cinq mille postes en France.

Le secteur de l’automobile et des sous-traitants est en première ligne, comme en témoignent les graves menaces qui pèsent sur les emplois des 2 700 salariés de Sevelnord à Hordain, des 480 salariés de la Fonderie du Poitou Aluminium ou des 140 salariés de Préciturn à Thiers, dans le Puy-de-Dôme.

La multiplication des plans sociaux et l’accélération des restructurations laissent présager une nouvelle et forte dégradation de l’emploi, synonyme de drames humains et de désagrégation du tissu social. Rassurer les marchés, c’est supprimer des emplois. Il est grand temps d’affronter la finance pour défendre et reconquérir notre industrie qui a perdu 700 000 emplois en dix ans.

Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement est-il prêt à s’engager dans cette voie, ce qui supposerait notamment, comme le proposent les députés du Front de gauche, d’interdire les licenciements boursiers, de donner de nouveaux droits aux salariés et à leurs comités d’entreprise, de contrôler l’utilisation des aides publiques et de renforcer la présence de l’État dans le capital des entreprises stratégiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député Marc Dolez, permettez-moi de rappeler, concernant la situation de l’emploi en France, que le marché a créé 160 000 emplois nets depuis le début de l’année.

M. Albert Facon. Et combien en a-t-il supprimé ?

M. François Baroin, ministre. L’évolution de l’économie internationale, le ralentissement américain, les interrogations dans les pays émergents, l’instabilité de la zone euro amènent naturellement certaines entreprises, non pas à ajuster la voilure en procédant à des plans sociaux ,mais à réduire leurs investissements.

M. Pierre Gosnat. Mais pas les dividendes aux actionnaires !

M. François Baroin, ministre. Concernant PSA, les choses sont claires : son président Philippe Varin a pris des engagements vis-à-vis du chef de l’État la semaine dernière.

M. Christian Paul. On sait ce que ça vaut !

M. Jean-Paul Lecoq. Cela ne vaut rien et vous le savez !

M. François Baroin, ministre. Il n’y aura pas de suppressions d’emplois à PSA en France dans les semaines, les mois ou les années qui viennent, il n’y aura pas d’impact ni à Aulnay ni à Sevelnord. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Le même esprit nous animait hier lorsque nous avons reçu, avec Éric Besson, le patron d’Areva. Une fuite, immédiatement démentie par la direction, avait fait état de suppressions d’emploi ; il n’y aura pas de suppressions d’emploi à Areva en France.

De même, l’État a fixé une ligne très claire : là où il est actionnaire, là ou, directement ou indirectement, de près ou de loin, il a son mot à dire, l'emploi ne sera pas une variable d’ajustement, malgré la crise ou le ralentissement économique.

M. Philippe Plisson.C’est de l’économie administrée ! Où est le libéralisme ?

M. François Baroin, ministre. Enfin, la nécessité d’augmenter leurs fonds propres constitue pour les banques une pression supplémentaire. Elle procéderont à des plans de départs volontaires sur les activités qui touchent à l’international dans le domaine de l’investissement, mais nous serons attentifs à ce qu’il n’y ait pas d’impact sur les banques de détail, autrement dit, pour parler clairement, sur le territoire national. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

 

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23 novembre 2011 3 23 /11 /novembre /2011 10:24

Ci-après le courrier adressé , le 18 Novembre, à François Fillon par les 7 parlementaires Front de Gauche de la région.

 

 

Monsieur le Premier ministre,

 

La politique mise en œuvre par le gouvernement depuis quatre ans et demi, jour pour jour, s’est traduite par : le renforcement de l’ensemble des difficultés de nos concitoyens ; la liquidation progressive des services publics et du modèle social français ; l’étranglement financier des collectivités locales (communes, départements, région) placées dans une dépendance budgétaire accrue vis-à vis de l’Etat ; l’assujettissement étroit de ce dernier aux exigences des milieux d’affaires et boursiers.

Avec les plans successifs de rigueur que votre majorité vient d’adopter en trois mois, la France est plus que jamais au bord de la récession sous l’effet d’une croissance en berne. Et la crise nourrie directement par tous ces choix ne cesse en retour, d’en accélérer les conséquences.

A l’échelle de notre Région Nord-Pas-de-Calais, il suffit de peu de chiffres pour témoigner des reculs et des gâchis opérés. Peu de chiffres mais ils sont accablants !

Avant d’en donner plusieurs exemples, nous voulons cependant vous dire que nous partageons la colère des victimes de l’amiante qu’une décision du 27 octobre de la Cour d’Appel de Douai suite à une démarche du Fiva, condamne à rembourser des indemnités légitimement perçues. Nous demandons que le gouvernement prenne l’initiative d’une loi pour mettre un terme à cette indignité.

Et par ailleurs, nous nous associons à l’attente de la corporation minière d’ouverture de négociations pour garantir une vraie gratuité des soins et l’emploi des personnels du régime minier.

Le dossier amiante et celui du régime minier conjuguent l’un et l’autre, l’exigence de justice sociale et de dignité portée par la population du Nord-Pas-de-Calais. Ils sont à ce titre, exemplaires de la détermination de nos concitoyens mais aussi de la dégradation des conditions et moyens de vie de l’immense majorité des habitants.

Les chiffres, ce sont d’abord ceux du logement, au moment où le gouvernement renforce son désengagement de la construction sociale au sein du Budget 2012. On recense 131 000 demandes de logement en attente dans le Nord-Pas-de-Calais.

Ceux de la santé ensuite, avec un déficit de nos hôpitaux régionaux estimé à 20 millions d’euros. Réduit à grand renfort d’austérité, ce déficit pèse sur les conditions de travail des personnels, les conditions d’accueil et de soins des usagers, l’amélioration des moyens des établissements.

Une étude de l’Observatoire régional de la santé place le Nord-Pas-de-Calais généralement en fin de classement des comparatifs sanitaires inter-régionaux, et Lille « loin derrière Toulouse, Lyon, Bordeaux ou encore Strasbourg pour ce qui concerne l’offre de soins ». Cela légitime la demande « de moyens supplémentaires pour les régions défavorisées » rappelée à propos de la surmortalité régionale liée aux cancers.

La situation scolaire suscite les même alarmes quand on évalue à 10 000 le nombre de jeunes qui, chaque année dans notre Région, quittent l’école sans qualification. Nous revendiquons le rétablissement de l’ensemble des milliers de postes supprimés en cinq ans, indispensables à l’objectif de réussite scolaire pour tous.

Le rejet récent du dossier de candidature lillois aux financements nationaux pour l’enseignement supérieur et la recherche ajoute une dimension supplémentaire à ces enjeux éducatifs. Nous proposons que soit réexaminée la question des moyens d’Etat qu’appelle l’essor de l’université et de la recherche en région.

Que dire enfin des chiffres du chômage ? Nos deux départements comptent 372 000 demandeurs d’emploi. Plus de 63 500 jeunes de moins de 25 ans sont sans travail. Le chômage de longue durée explose et le taux de chômage régional est supérieur de 3,5 points au taux national.

Tous nos bassins d’emploi sans exception, sont frappés par un chômage de masse désormais présent dans la vie quotidienne d’au moins un million d’habitants (hommes, femmes et enfants) du Nord-Pas-de-Calais : un habitant sur quatre de notre Région !

Dans un tel contexte, l’appauvrissement de la société française prend dans nos territoires une dimension supérieure. Le Nord-Pas-de-Calais s’il représente 6% de la population recense 10,7% des attributaires du RSA et 7,5% des attributaires de l’allocation adulte handicapé. Mais, et c’est un contraste insupportable, il comptabilise aussi 17 des 200 plus grandes fortunes de France (8,5% par conséquent).

Nous sommes fermement convaincus qu’il n’y a pas de fatalité à ces dégradations et que les moyens existent aux plans européen, national et régional de faire autrement.

C’est pourquoi nous vous demandons de nous recevoir pour vous soumettre des propositions et des attentes prenant appui sur les atouts de nos départements.

Au nombre de ces atouts, la jeunesse de notre population; notre position stratégique au cœur de l’Europe du Nord ; notre littoral et des ports ouverts aux activités essentielles que sont la pêche et sa transformation, le fret et le transport voyageurs ; nos établissements d’enseignement supérieur, laboratoires et centres de recherche ;  les savoir-faire des salariés et cadres de nos entreprises…

Nous demandons d’abord que l’Etat assume sa responsabilité vis-à-vis de nos collectivités locales et restitue le milliard et demi d’euros qu’il doit aux habitants du Nord Pas de Calais.

Pour l’emploi, l’industrie, socle de notre économie, doit figurer au cœur du redressement de notre région.

Cela concerne le ferroviaire pour lequel une commission parlementaire a établi 25 mesures favorisant un développement en filière pour associer groupes constructeurs et PME sous-traitantes dans la conquête de marchés. Où en est le gouvernement dans la mise en œuvre des dispositifs adoptés à l’unanimité des parlementaires de cette commission ?

Cela concerne aussi l’automobile qui souffre aujourd’hui de l’annonce de la fin du partenariat Fiat-PSA à Sevelnord (Hordain) : 2 000 emplois supprimés en trois ans et la crainte de voir disparaître les 2 500 emplois restants. Les conséquences seraient considérables sur les 10 000 emplois des sous-traitants et équipementiers en dépendant, à l’exemple du groupe Faurécia où des restructurations sont en cours, et sur toute la filière automobile. En intervenant auprès des groupes constructeurs, l’Etat doit engager tout son poids pour la mise en œuvre de solutions industrielles et pour des investissements productifs.

 

 

  

                                   Alain BOCQUET                Jean-Jacques CANDELIER            Marc DOLEZ

                                   Député du Nord                Député du Nord                             Député du Nord

 

 

                                   Michèle DEMESSINE         Eric BOCQUET                              Dominique WATRIN

                                   Sénatrice du Nord              Sénateur du Nord                          Sénateur du Pas-de-Calais

 

 

                                   Jacky HENIN

                                   Député Européen

 

 

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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 08:57

Ci-après l’intervention de Marc DOLEZ dans la discussion du budget de la justice (Assemblée Nationale, 10 Novembre 2011, 1ère séance).

 

M. Marc Dolez. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à s’en tenir à la communication du Gouvernement, notre justice se porterait plutôt bien puisque son budget est annoncé en hausse. Mais, à y regarder de près, la présentation des chiffres ne peut masquer le fossé béant qui sépare le discours de la réalité.

En effet, dans la réalité, tous les personnels peuvent en témoigner, la situation des juridictions, des établissements pénitentiaires et des services de la protection judicaire de la jeunesse n’a jamais été aussi difficile. Sur ce point, je vous renvoie au bilan dressé par l’Union syndicale des magistrats dans son Livre blanc 2010, à l’issue d’une année passée à visiter 165 juridictions.

Il convient ensuite de mettre l’augmentation annoncée des crédits en parallèle avec l’accroissement des recours à la justice, lié en grande partie à la politique pénale répressive menée ces dernières années : l’augmentation des crédits ne correspond pas aux évolutions des contentieux et des effectifs. La Commission européenne pour l’efficacité de la justice montre clairement, dans son rapport 2010 d’évaluation des systèmes judiciaires européens, que les augmentations budgétaires sont trois à quatre fois supérieures dans les autres grandes démocraties européennes, comme en Allemagne ou en Angleterre.

Comme chaque année, les augmentations budgétaires sont en réalité affectées à l’administration pénitentiaire, la protection judiciaire de la jeunesse voyant son budget très légèrement progresser, alors que le budget des services judiciaires est en nette baisse, de plus de 600 millions d’euros !

Comme chaque année, la répartition des crédits reflète la politique du « tout répressif » menée par le Gouvernement. Ainsi, l’essentiel du budget consacré à l’immobilier concerne la création de nouvelles places de prison. Dès 2012, près de 900 nouvelles places seront ouvertes pour répondre au « toujours plus » carcéral. Or, s’il nous paraît nécessaire de remettre les établissements aux normes, il nous semble, en revanche, absurde de se focaliser sur l’accroissement constant des places de prison. Et ce d’autant plus que les partenariats public-privé se multiplient et conduisent l’État à acquitter ensuite des loyers onéreux, qui, dans certaines régions, absorbent les deux tiers des crédits de fonctionnement. Nous déplorons que la création de places supplémentaires soit effectuée au détriment des moyens alloués pour le bon fonctionnement des établissements pénitentiaires et du renforcement des services pénitentiaires d’insertion et de probation.

S’agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, si son budget fait apparaître une légère augmentation cette année, après avoir fortement été réduit en 2010, c’est uniquement du fait de la transformation d’un certain nombre de foyers éducatifs en centres d’éducation fermés.

Par ailleurs, l’accroissement des effectifs annoncé dans la quasi-totalité des programmes est un leurre. Les effectifs viennent à peine compenser les postes supprimés les années précédentes et restent insuffisants pour faire face aux deux réformes récemment adoptées sur les citoyens assesseurs et les hospitalisations sous contrainte. En 2012, le manque de fonctionnaires restera donc criant dans la plupart des juridictions.

Je veux enfin dire un mot de la nouvelle taxe de procédure de 35 euros exigée pour l’introduction de toute instance. Cette nouvelle taxe est contestée unanimement par tous les syndicats de magistrats et d’avocats, car elle remet en cause la gratuité d’accès à la justice et, de fait, entrave l’accès au droit et au juge, pourtant protégé par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Cette mesure est pour nous tout à fait inacceptable !

Pour l’ensemble de ces raisons, les députés du groupe GDR voteront contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

 

 

 

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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 08:16

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour exposer sa question n° 1565 relative à l’application du décret du 30 août 2011 relatif au régime spécial de sécurité sociale dans les mines.

M. Marc Dolez. Ma question porte sur le décret du 30 août 2011, qui signe la mort programmée du régime minier puisqu’il prévoit son transfert vers le régime général pour la fin de 2013. Ce décret, imposé sans concertation, ni avec les organisations syndicales ni avec les élus, suscite, dans le Nord-Pas-de-Calais, de grandes inquiétudes, tant chez les affiliés que chez les salariés du régime minier.

M. le ministre Bertrand a tenu, à ce sujet, des propos qui se veulent rassurants, mais quelles garanties concrètes le Gouvernement entend-il apporter sur trois points cruciaux ?

Premièrement, quelles garanties aura-t-on sur la gratuité des soins, sachant que le non-paiement des franchises et des dépassements d’honoraires n’est pas spécifié dans le décret et que la gratuité des transports, l’article 2-2-B supprimé en 2009, n’a pas été rétablie ?

Deuxièmement, quelles garanties d’emploi y aura-t-il pour les 4 500 salariés de la CARMI, notamment celle qu’aucune mobilité géographique ne leur sera imposée ?

Troisièmement, quelle garantie de la pérennisation de l’offre de soins entend-il apporter ? Je veux insister plus particulièrement sur ce point car, dans une région sous-médicalisée comme le Nord-Pas-de-Calais, lanterne rouge des régions françaises, l’offre de soins de la CARMI est essentielle et reconnue, avec une prise en charge médicale, sanitaire et sociale accessible à l’ensemble de la population du bassin minier.

Notre crainte est grande que la gouvernance nationale prévue par le décret ne permette plus de tenir compte de la spécificité d’une région qui compte 60 000 affiliés, souvent très âgés, avec une moyenne d’âge de quatre-vingts ans, la CARMI assurant, pour sa part, une offre de soins complémentaire et spécialisée, par la prise en charge de certaines maladies spécifiques comme la silicose, mais aussi dans l’accompagnement des personnes âgées.

Je veux le redire ici avec force, le Nord-Pas-de-Calais n’a pas les moyens de se passer d’un réseau sanitaire d’une telle importance, dont l’organisation expérimentée et unique est reconnue de tous.

M. le président. La parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Xavier Bertrand, qui m’a priée de vous transmettre sa réponse.

Le décret relatif au régime spécial de sécurité sociale dans les mines a été publié au Journal officiel de la République le 31 août dernier et est entré en vigueur le 1er septembre 2011, à travers la fusion de la caisse nationale de sécurité sociale minière avec les caisses régionales minières. Ce décret est conforme aux engagements du Gouvernement contenus dans le document d’orientation et a fait l’objet de concertations avec les fédérations minières.

Afin d’assurer la pérennité de l’offre de soins du régime ainsi que la préservation de son réseau de proximité, le Gouvernement a décidé de l’adosser à un partenaire capable de financer les investissements nécessaires à sa modernisation, à savoir le régime général d’assurance maladie, au travers des UGECAM.

Afin de conforter le financement du risque maladie, celui-ci fera l’objet d’une intégration financière au sein du régime général d’assurance maladie. Cette intégration s’effectuera sans remise en cause des garanties spécifiques offertes par le régime minier : le Gouvernement proposera que le remboursement à 100 % des dépenses de soins, prévu depuis 1946 et justifié par la situation et les besoins spécifiques des mineurs, fasse l’objet d’une inscription législative. À ce titre, il faut rappeler que le régime minier est le seul régime spécial à ne pas appliquer les dispositifs de participation forfaitaire et de franchises médicales, respectivement instaurés par la loi du 13 août 2004 et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

Par ailleurs, l’action sanitaire et sociale sera transférée à l’association nationale de garantie des droits des mineurs, très proche des mineurs et de leurs familles, et les crédits d’action sociale seront augmentés en vue de compenser les effets de la suppression de l’article 2-2-B, avec 2,5 millions d’euros supplémentaires en 2011, 3,5 millions d’euros en 2012, afin qu’aucun affilié du régime minier n’ait à renoncer aux soins.

Conformément aux engagements pris par le Président de la République et afin de remédier aux injustices créées par le dispositif mis en place en 2001, les pensions de retraite minières seront revalorisées à compter de la fin de 2011. Une première revalorisation de 3 % des pensions liquidées avant 1987 sera mise en œuvre dès le 1er novembre 2011. Cet effort sera progressivement porté à 5 % d’ici à 2015.

Enfin, Xavier Bertrand souhaite réaffirmer que la garantie d’emploi sera assurée à tous les salariés des CARMI et qu’ils bénéficieront de la liberté dans le choix de leur convention collective avant le transfert des activités entre la convention minière et la convention de l’UCANSS. Aucune mobilité géographique ne leur sera imposée.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Trois remarques rapides, madame la secrétaire d’État.

Premièrement, les fédérations minières seront très heureuses d’apprendre ce matin qu’une réelle concertation avait été engagée sur le contenu du décret du 30 août 2011 : tel n’a évidemment pas été le cas.

Deuxièmement, vous annoncez une traduction législative concernant la gratuité des soins à garantir aux mineurs. J’espère que cet engagement sera tenu. Encore faudra-t-il examiner de très près selon quelles modalités et en quels termes cela sera mis en œuvre.

Troisièmement, vous n’avez malheureusement pas répondu à la question fondamentale que je vous ai posée concernant l’offre de soins dans une région comme le Nord-Pas-de-Calais, qui, à l’évidence, ne peut pas se passer de ce réseau sanitaire de proximité et de qualité.

(Assemblée Nationale, 1ère séance du mardi 18 Octobre 2011)

 

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12 octobre 2011 3 12 /10 /octobre /2011 14:18

Marc DOLEZ a défendu, au nom du groupe G.D.R, une motion de renvoi en commission de la proposition de loi relative à la simplification du droit. Ci-après le compte-rendu du débat (Assemblée Nationale, 11 Octobre 2011, 1ère séance).

Mme la présidente. J’ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Nous examinons aujourd’hui la quatrième proposition de loi dite de simplification du droit. Pourtant, preuve a déjà été faite que les lois de simplification compliquent plus souvent qu’elles ne simplifient. Le professeur Bertrand Seiller note à cet égard que « la simplification [...] peut être paradoxalement elle-même une source de complexité [...] ».

Il n’est pas seul. Une grande partie de la doctrine pointe les limites et carences de la simplification du droit. Le professeur Pierre Delvolvé considère, pour sa part, qu’elle est une « formule si creuse et si vague qu’elle ne peut donner son unité à un dispositif qui part dans tous les sens ».

Karine Gilberg, enseignante en légistique à l’université Paris 2, souligne également que ces propositions de simplification « souffrent de différents problèmes : disparates par essence, elles ne peuvent avoir de cohérence globale ; de multiples acteurs contribuent à leur rédaction, surtout elles opèrent souvent des modifications partielles, d’où, une fois encore, des problèmes de cohérence ».

La proposition de loi que nous examinons en fait, une fois de plus, la démonstration. Nous partageons probablement tous le constat selon lequel notre droit doit faire face à un mouvement de complexification.

Dès 1991, le Conseil d’État, dans son rapport public annuel consacré à la sécurité juridique, a exprimé ses préoccupations sur la complexité du droit, caractérisée par la prolifération désordonnée des textes, l’instabilité croissante des règles et la dégradation manifeste de la norme. Allant de pair avec l’insécurité juridique et la dégradation de la qualité de la réglementation, l’inflation législative atteint aujourd’hui des proportions démesurées, inégalées, qui menacent l’état de droit.

Cette dérive a, de nouveau, été mise en lumière en 2006 par le rapport du Conseil d’État sur la sécurité et la complexité juridique. De 2000 à 2005, l’augmentation est en moyenne, par an, de soixante-dix lois, cinquante ordonnances et 1 500 décrets. Cette augmentation entraîne une instabilité de la norme telle que, en moyenne, 10 % des articles d’un code sont modifiés chaque année – et cette tendance ne s’est pas inversée ces derniers temps.

Si nous sommes convaincus que la représentation nationale doit se saisir de ce problème, nous contestons, en revanche, la façon de s’y atteler. Nous ne sommes, d’ailleurs, pas les seuls, puisque le sénateur Hervé Maurey, dans son avis émis le 5 octobre dernier au nom de la commission de l’économie du Sénat, souligne que la France est le seul pays à opter pour des lois de simplification « fourre-tout » aussi denses.

Le rapporteur de notre commission des lois entame son rapport en citant Montaigne : « […] nous avons en France plus de lois que tout le reste du monde ensemble, et plus qu’il n’en faudrait à régler tous les mondes d’Épicure [...]. [Les lois] les plus désirables, ce sont les plus rares, plus simples, et générales. »

La citation est belle et la problématique parfaitement résumée. Mais les lois dites de simplification qui nous sont soumises ne sont ni rares, ni simples, ni générales.

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. Marc Dolez. Notre rapporteur affirme aussi que ces lois de simplification successives visent à agir « contre la propension française à la stratification et à la complexification du droit », que ces textes visent à abroger des lois obsolètes pour créer « les conditions d’une meilleure intelligibilité de la législation à travers une codification plus large et actualisée ».

Or la proposition de loi du président de la commission des lois Jean-Luc Warsmann vise un tout autre objectif. Elle simplifie parfois, elle allège aussi certaines procédures administratives mais, et c’est là l’essentiel, nombreuses sont les dispositions qui consistent en des modifications de fond.

Vous-même, monsieur le secrétaire d’État, n’en faites pas mystère, puisque, lors de votre audition devant la commission des lois, vous nous avez indiqué ceci : « Alors que la RGPP tend à simplifier du haut vers le bas, il s’agit ici de simplifier du bas vers le haut ».

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Eh oui !

M. Marc Dolez. Nous ignorions que la RGPP était une mesure de simplification… Le non-remplacement du départ à la retraite d’un fonctionnaire sur deux n’est évidemment pas une mesure de simplification mais un choix politique majeur aux conséquences désastreuses. Nous le mesurons chaque jour.

En fait, ce texte vise au développement de l’activité et de la croissance qui, je cite notre rapporteur, « ne sauraient attendre le renouvellement des mandats de l’exécutif et de l’Assemblée nationale, au printemps prochain ». Il indique également : « il a été délibérément choisi d’inclure un nombre significatif de mesures pertinentes pour la dynamisation des entreprises françaises et la création d’emplois. Cette ambition ne poursuit qu’un seul objectif : accompagner dans les meilleures conditions possibles la reprise économique ». Où est-il question de simplification du droit ?

Je ne dresserai pas ici la longue liste de tous ces articles qui ne simplifient pas notre droit mais visent, en réalité, à mettre en œuvre la politique du Gouvernement.

Mes collègues Roland Muzeau et Martine Billard reviendront en détail dans leurs interventions sur les sujets touchant notamment à la vie sociale des entreprises. Ils dénonceront notamment ces articles qui entament significativement les droits des salariés.

Pour illustrer mon propos, je citerai l’article 84 qui tend à faciliter plus encore la cession du patrimoine HLM et qui contribue donc à réduire le volume du parc social.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois. C’est faux ! C’est l’inverse !

M. Marc Dolez. Je citerai aussi l’article 88 qui porte sur le seuil à partir duquel les marchés publics doivent faire l’objet d’une procédure formalisée de publicité et de mise en concurrence préalable.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Oui, c’est bien.

M. Marc Dolez. À travers l’élévation de ce seuil, ce sont les principes mêmes du droit de la commande publique qui s’en trouvent atteints. En effet, les collectivités, en particulier les plus petites d’entre elles, pourront désormais dépenser des parts importantes de leur budget de gré à gré, sans procédure de contrôle ni de traçabilité.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois. Oh !

M. Jean-Charles Taugourdeau. C’est la société de défiance !

M. Marc Dolez. Les possibilités de conflits d’intérêts et de clientélisme risquent de s’en trouver multipliées.

Déjà en 2008, le Gouvernement avait tenté de remonter ce seuil à 20 000 euros par décret mais la mesure avait été annulée par le Conseil d’État. Celui-ci s’était rendu aux arguments des requérants, selon lesquels ce relèvement de seuil violait les grands principes de la commande publique, à savoir la liberté d’accès, l’égalité de traitement et la transparence des procédures.

M. Michel Issindou. Exactement !

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois. Le Conseil d’État a donné un avis favorable !

M. Marc Dolez. Une telle question ne relève d’ailleurs pas du domaine de la loi.

Ces quelques exemples attestent que cette proposition de loi n’est pas simplement un exercice de toilettage de dispositions obsolètes ou redondantes, mais bel et bien une série de mesures de fond, touchant à des domaines variés et aux répercussions significatives.

Si ces mesures peuvent, dans certains cas, se justifier, elles ne sauraient être traitées au détour d’un texte fourre-tout de plus de quatre-vingt-dix articles. Elles nécessitent en effet de la concertation, des études d’impact et un réel débat démocratique.

Ce texte n’est pas une loi de simplification, il aurait donc mérité d’être examiné comme une loi ayant pour objectif, comme vous le prétendez, la croissance et la compétitivité, bref comme une loi à visée économique.

L’exigence de clarté et de sincérité du débat parlementaire est un principe constitutionnel explicitement reconnu, depuis 2006, par le Conseil constitutionnel. Cette exigence aurait commandé que les diverses dispositions du texte, rassemblées de manière disparate, soient examinées au fond par les commissions concernées, ce qui aurait été aussi en cohérence avec la refonte de notre règlement, qui accorde une large place au travail des commissions.

La commission des finances aurait ainsi pu se prononcer sur les dispositions ayant de lourdes incidences financières. La commission des affaires culturelles aurait pu examiner les articles ayant trait à la presse et aux médias, ainsi qu’au patrimoine, notamment les articles 75 à 79, relatifs à des sujets aussi sensibles que le statut des agences de presse ou la représentation syndicale dans les entreprises de presse.

Chacun conviendra, en outre, que les conditions d’examen de cette proposition de loi n’ont pas été vraiment satisfaisantes. Le rapport n’a été publié que le jour même de la clôture du délai de dépôt des amendements, obligeant le Gouvernement à déclarer l’urgence sur ce texte pour ne pas enfreindre le règlement de notre assemblée.

Pour toutes ces raisons, les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche, demandent à l’Assemblée d’adopter cette motion de renvoi en commission qui, vous l’aurez compris, équivaut pour eux à une motion de renvoi tout court tant ce texte leur paraît irrecevable sur la forme comme sur le fond. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

 

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10 octobre 2011 1 10 /10 /octobre /2011 10:10

Marc DOLEZ est intervenu, le 5 Octobre à la tribune de l’Assemblée Nationale, dans la discussion d’une proposition de loi relative à la création d’un service citoyen pour les mineurs délinquants. Ci-après le texte de son intervention.

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Marc Dolez.

Je rappelle que le temps programmé ne s’applique pas. Je demande en conséquence à chacun de respecter le temps de parole qui lui est imparti.

M. Marc Dolez. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, loin de dessiner un projet ambitieux pour l’enfance en difficulté, la proposition de loi que nous examinons est un texte d’affichage qui n’apporte pas de réponses satisfaisantes au problème réel de la délinquance des mineurs.

Nous ne sommes pas les seuls à le penser puisque, de manière tout à fait exceptionnelle – quoi que notre rapporteur ait pu en dire il y a quelques instants –, ce texte a été rejeté à une large majorité la semaine dernière par la commission de la défense saisie pour avis.

D’emblée, la proposition de loi invoque dans son exposé des motifs le postulat erroné d’une augmentation continue de la délinquance des mineurs, alors qu’en réalité la part de la délinquance des mineurs dans la délinquance générale reste stable à 18 %.

À vrai dire, la préoccupation des professionnels tient plus à la difficulté de trouver des réponses diversifiées et individualisées pour répondre aux cas de jeunes aux parcours particulièrement déstructurés qu’à une prétendue hausse exponentielle du nombre de mineurs délinquants.

Comme le souligne très clairement le sociologue Laurent Mucchielli, l’affirmation de l’existence d’une augmentation continue de la délinquance des mineurs constitue « une sorte de vraie-fausse information et, à tout le moins, une vérité totalement tronquée ». Il en détaille les raisons dans une tribune publiée par le journal Le Monde en avril dernier intitulée : « Les mineurs délinquants menacent-ils la société française ? » Il y indique notamment qu’élargir la définition de la délinquance et donner des consignes pour poursuivre toutes les infractions, même les plus bénignes, ne peut avoir pour conséquence logique qu’une augmentation des procédures enregistrées. Au-delà des chiffres, il analyse aussi de manière très pertinente la nature de cette délinquance grâce au volume annuel des condamnations publié par le ministère de la justice, qui donne à voir une image très éloignée de celle renvoyée par des faits divers dont il faut répéter qu’ils ne sont pas représentatifs de la vie quotidienne de l’ensemble de la société française.

Pour notre part, nous réfutons à la fois l’opportunité et le contenu de ce texte.

Pour ce qui est de l’opportunité d’une énième réforme de l’ordonnance de 1945 alors qu’un code de la justice pénale des mineurs est selon la chancellerie « quasiment achevé », il paraît pour le moins illogique d’opérer de nouvelles modifications qui ne peuvent que nuire à la cohérence et à la lisibilité de l’ordonnance.

Sur le fond, l’idée d’un encadrement militaire pour les mineurs délinquants constitue selon nous une réponse inopérante. L’esprit de la proposition de loi repose sur la conviction de l’efficacité éducative de la discipline militaire et propose donc de mettre en œuvre un « contrat de service en établissement d’insertion » dans le cadre d’« une discipline stricte mais valorisante inspirée de la rigueur militaire ».

Il s’agit en réalité de proposer aux mineurs condamnés d’effectuer leur peine au sein d’un établissement cherchant à faciliter l’insertion professionnelle, plutôt qu’en prison. Comme le souligne notre rapporteur, le dispositif prévu sera plus ou moins basé sur le volontariat. Selon lui, il s’inscrira dans le cadre de l’exécution d’une sanction pénale qui, à ce titre, s’imposera au jeune condamné. S’il la refuse, il devra exécuter une peine d’emprisonnement. Pour le rapporteur, le choix est donc clair et exigeant : c’est soit le service citoyen, soit la prison. Ce volontariat contraint nécessitera toutefois l’accord du mineur et des titulaires de l’autorité parentale : on perçoit la faible marge de manœuvre qui leur sera accordée.

La proposition de loi prévoit que ce service citoyen sera mis en place dans des structures déjà existantes, les établissements publics d’insertion de la défense, dans lesquels d’anciens militaires sont déjà employés – ils représentent environ la moitié des effectifs. Peut-on réellement considérer que d’anciens militaires sans connaissance particulière en matière d’encadrement des mineurs délinquants seraient plus à même que les éducateurs spécialisés d’encadrer ces jeunes ? Cela revient à négliger l’expérience des professionnels de terrain.

En permettant à la justice d’astreindre un mineur auteur d’une infraction à exécuter un contrat de service dans un de ces centres, le texte élargit considérablement les missions attribuées à l’EPIDE et le détourne ainsi de sa fonction originelle consistant à assurer l’insertion sociale et professionnelle de jeunes en difficulté scolaire, sans qualification professionnelle ni emploi, en risque de marginalisation et volontaires au terme d’un projet éducatif global.

Ce programme lancé en 2005 avait pour objectif affiché d’intégrer rapidement 10 000 jeunes, puis, à terme, 50 000. En 2010, loin de l’objectif initial, vingt centres accueillent en internat 2 250 jeunes encadrés par 969 personnes. Avec un taux de démission en cours de route de 38 %, et à l’arrivée un emploi stable pour un jeune sur deux, le dispositif a malgré tout trouvé une certaine logique, en particulier parce qu’il s’adresse exclusivement à des jeunes volontaires pour participer à la démarche.

La proposition de loi de notre collègue Éric Ciotti vient rompre cet équilibre en mêlant à ces jeunes volontaire, des mineurs délinquants qui devront choisir entre la prison et l’EPIDE. En réunissant des jeunes volontaires en grande difficulté sociale et des mineurs délinquants, ayant rejoint l’EPIDE dans le seul but d’échapper à la prison, vous transformez une structure d’insertion en structure alternative à l’enfermement, ni plus ni moins.

L’inquiétude est partagée par l’ensemble des spécialistes de la justice des mineurs. Le risque de détruire le dispositif « Défense deuxième chance », actuellement fondé sur une démarche volontaire, est bien réel car le fonctionnement de l’EPIDE ne permettra pas d’assurer les missions supplémentaires prévues par le texte. Le public étant différent, l’approche pédagogique ne peut pas être la même. À cet égard, il est regrettable qu’une étude sur le fonctionnement de l’EPIDE lui-même n’ait pas été préalablement réalisée car il y a lieu de s’interroger sur la capacité de ces établissements à accueillir des mineurs délinquants qui pourront représenter jusqu’à 10 % des effectifs.

L’inquiétude sur le devenir de l’EPIDE est également partagé par la commission de la défense et par son président, qui a lui-même déclaré en commission craindre que les EPIDE qui fonctionnent bien ne soient déstabilisés.

En fait, le dispositif proposé n’est pas vraiment nouveau. Des expériences similaires, consistant à encadrer militairement des jeunes délinquants, ont été menées par le passé : elles n’ont pas été concluantes. Cela a été le cas notamment de l’association Jeunes en équipe de travail, créée en 1986, qui avait pour mission d’organiser des stages de rupture de quatre mois pour de jeunes délinquants de nationalité française ou étrangère en situation régulière. Cette expérience a été interrompue en 2003.

La proposition de loi que nous examinons ne constitue finalement qu’un nouvel effet d’annonce, un texte de circonstance à quelques mois de l’élection présidentielle.

Ce n’est pas cette nouvelle modification de l’ordonnance de 1945 qui palliera l’absence d’éducateurs en milieu ouvert prêts à intervenir dès le début de la déscolarisation ou des difficultés d’exercice de l’autorité parentale.

La meilleure prévention de la délinquance des mineurs reste l’intervention des services et des magistrats en assistance éducative, ce qui suppose de disposer des moyens nécessaires en personnels, en temps et en places disponibles dans des structures adaptées.

Pour toutes ces raisons, les députés communistes, républicains, citoyens et du parti de gauche voteront contre cette proposition de loi. Ils rejettent ce texte dans sa globalité, raison pour laquelle ils ont décidé de ne pas déposer d’amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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23 juin 2011 4 23 /06 /juin /2011 09:38

 

Marc Dolez a fait partie de la commission d’enquête sur la situation de l’industrie ferroviaire, mise en place par l’Assemblée Nationale (Décembre 2010 – Juin 2011).

Il a interpellé le gouvernement sur le sujet lors de la séance des questions au gouvernement (22 Juin 2011, 1ère séance).

 

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Marc Dolez. Monsieur le Premier ministre, notre commission d’enquête sur l’industrie ferroviaire, animée par mes collègues Alain Bocquet, son président, et Yanick Paternotte, son rapporteur, vient d’achever ses travaux. Ses conclusions, unanimement partagées par les membres de la commission, reposent sur la conviction forte que cette industrie, aujourd'hui à la croisée des chemins, peut avoir un bel avenir de par son histoire, ses avancées technologiques, le talent des hommes et des femmes qui la font vivre. À la condition toutefois, et c’est une impérieuse nécessité, de mieux organiser et de mieux structurer la filière, tant au niveau national qu’européen, pour être à même d’affronter la compétition mondiale.

Tel est le sens des recommandations de la commission. Elle formule des propositions pragmatiques qui, pour certaines, relèvent de l’urgence : urgence à ce que la SNCF, l’opérateur historique, et ses filiales clarifient leur stratégie et leur politique d’investissements ; urgence, alors que l’évolution actuelle du fret contredit les orientations du Grenelle de l’environnement, à lancer un programme de construction de wagons et à mettre en place des solutions de préfinancement pour sauvegarder le savoir-faire que maîtrisent les entreprises ABRF, Lohr Industrie et, à Douai, AFR Titagarh.

C’est pourquoi, monsieur le Premier ministre, je vous demande de nous indiquer de quelle manière le Gouvernement entend se saisir de ces différentes recommandations pour répondre à l’urgence de la situation, pour créer les synergies, comme le demandent l’ensemble des salariés du ferroviaire, entre sous-traitants, équipementiers et donneurs d’ordre, synergies absolument indispensables pour assurer la pérennité des emplois et des entreprises, et pour que l’Europe, largement passive à la concurrence, définisse enfin une stratégie commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur Marc Dolez, je voudrais d’abord saluer le travail de la commission d’enquête, présidée par Alain Bocquet, avec pour rapporteur Yanick Paternotte. Éric Besson et moi-même étudions actuellement avec la plus grande attention les vingt-cinq propositions qui en sont issues.

La plus emblématique de ces propositions, c’est sans aucun doute la création d’un Airbus du rail. Il faut dire qu’en pleine période de Salon du Bourget, à l’heure où la réussite d’Airbus est très visible, cette question s’impose : il s’agirait de rapprocher Alstom, Siemens et d’autres industriels européens. Il est vrai que l’industrie ferroviaire ne s’est pas jusqu’à maintenant distinguée par sa coopération au niveau européen. Il y a des raisons : nos voisins allemands, par exemple, ont pris des positions en Asie qui leur offrent des perspectives différentes des nôtres. Mais votre rapport a le grand mérite de rappeler que l’univers ferroviaire est exposé au grand vent de la mondialisation. La Chine, Le Japon et la Corée sont probablement aujourd’hui la meilleure incitation à un rapprochement franco-allemand dans cette industrie.

Aussi, nous proposons, à la suite de votre rapport, une coopération franco-allemande renforcée comme première étape, avec la définition d’un projet industriel et stratégique entre nos deux pays, projet qui aurait vocation à s’élargir, avec sans aucun doute une harmonisation réglementaire et technique à la clef.

Et puis ce ne serait pas faire justice au travail de la commission d’enquête que de s’en tenir à cette seule proposition. Il est aussi question de valoriser le comité stratégique de filière issu des états généraux de l’industrie, d’améliorer la formation des personnels en la démultipliant, de travailler mieux sur la protection de notre propriété intellectuelle. C’est une boîte à outils que votre rapport, et le Gouvernement saura l’utiliser. Je lancerai, dès le mois de septembre, les assises du ferroviaire, au premier rang desquelles il y aura la question de notre stratégie industrielle de filières.

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23 juin 2011 4 23 /06 /juin /2011 09:33

Ci-après l’intervention de Marc Dolez, à l’Assemblée Nationale, dans la discussion générale du projet de loi sur « la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs » (21 Juin 2011, 2ème séance).

 

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

 

M. Marc Dolez. Disons-le d'emblée, le projet de loi dont nous avons entamé l’examen est un nouveau texte de circonstance, qui va compliquer encore un peu plus le fonctionnement de la justice. Pour notre part, nous considérons qu'il est irrecevable tant sur la forme que sur le fond.

Au prétexte de rapprocher les citoyens et la justice, de renforcer le lien devant exister entre la population et l'institution judiciaire, vous nous présentez un projet de loi élaboré à la hâte et sans aucune concertation, alors même que la réforme de la carte judiciaire aboutit à fermer des tribunaux et que le manque de moyens humains et matériels de la justice est patent.

Vous faites de ce texte une urgence, alors que nombre de ses aspects sont inquiétants, voire gravissimes s’agissant des dispositions concernant la justice des mineurs. Ce texte ne réglera rien, la question centrale des moyens réels dont dispose la justice n’étant pas au cœur de ce projet.

Si l’objectif principal est réellement d'ouvrir la justice sur la société, d'ouvrir les institutions judiciaires aux citoyens, pourquoi ne pas avoir pris le temps de mener une vraie concertation ? Pourquoi recourir à la procédure parlementaire accélérée qui ne permet qu'une seule lecture devant chaque assemblée ? Bref, pourquoi ne pas se donner les moyens d'une vraie réforme ?

Ce sont, en réalité, des considérations électoralistes à peine voilées qui, à moins d'un an de l'élection présidentielle, expliquent un projet de loi imprégné tant de cette défiance maintenant constante de l'exécutif à l'égard des magistrats que de la volonté de lutter contre le laxisme supposé des juges.

L'exposé des motifs ne laisse d'ailleurs guère de doute à cet égard, puisqu’il affirme que la participation des citoyens « assure que les décisions juridictionnelles ne sont pas déconnectées des évolutions de la société ». Il fait ainsi référence aux propos du Président de la République, souhaitant que le peuple puisse « donner son avis sur la sévérité de la réponse à apporter. »

Dans le cadre de notre discussion générale, et au nom des députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche, je souhaite plus particulièrement mettre l'accent sur quelques remarques sur chacun des trois volets du texte : participation de citoyens assesseurs en correctionnelle et à l'application des peines, nouvelle réforme des dispositions relatives au jugement des crimes, réforme de la justice des mineurs. Autant de modifications qui ne résoudront aucun des problèmes actuels de la justice, mais risquent au contraire de les aggraver.

Concernant d'abord la création des citoyens assesseurs, l'objectif de la participation de nos concitoyens, pour enrichir le débat judiciaire et leur permettre d'en avoir une meilleure compréhension, ne pourrait qu'être louable si les modalités de cette création le permettaient vraiment.

Mais ce n’est pas le cas, et le premier problème est celui des critères du recours aux citoyens assesseurs pour le jugement des délits, puisque le choix est fait de ne les associer que pour les affaires qui « portent atteinte quotidiennement à la sécurité et à la tranquillité de la population ».

Sont donc exclues, malgré les lourdes peines qu'elles font encourir à leurs auteurs, les infractions relevant du domaine économique et financier ou de la délinquance organisée.

Ces critères sont éminemment contestables, car cela revient à considérer que les juges doivent être encadrés et soumis à la pression populaire pour sanctionner les vols et les agressions, mais pas pour les délits économiques et financiers, pour lesquels, ces dernières années, se multiplient d'ailleurs les tentatives de dépénalisation ou de réduction du délai de prescription.

Il en résulte deux catégories de juridictions correctionnelles : celles comportant des citoyens assesseurs, et celles composées des seuls magistrats ; et donc une justice à deux vitesses en correctionnelle.

Les délits seront ainsi jugés par des formations différentes en fonction de la nature des faits et non du quantum de la peine encourue, ce qui pose assurément la question du respect du principe d'égalité des citoyens devant la loi.

Autre conséquence du recours aux citoyens assesseurs : une procédure plus lourde, plus lente, et qui va dégrader les conditions du jugement, en raison de l’oralité nécessaire des débats, pour que le citoyen assesseur comprenne la réalité des faits et les problèmes juridiques posés. Pendant le délibéré, il sera nécessaire de lui fournir davantage d'informations sur les points techniques afin qu'il puisse prendre sa décision en toute connaissance de cause. Au final, le temps ainsi passé conduira immanquablement à une réduction du nombre de dossiers traités par audience, et donc au ralentissement de la durée de traitement des affaires.

La réforme va ainsi au moins doubler le nombre d’audiences pénales, et pour reprendre les termes utilisés par le président de l’Union syndicale des magistrats : « Elle risque de faire exploser le système judiciaire. C'est une folie et tout le monde le sait ».

S'agissant de l'introduction de citoyens assesseurs pour l'application des peines, le projet de loi prévoit qu'ils siégeront aux côtés des magistrats du tribunal d'application des peines et des chambres d'application des peines pour toutes les décisions relatives notamment à la libération conditionnelle ou au relèvement de la période de sûreté, dès lors que la peine est supérieure à cinq ans d'emprisonnement. À vrai dire, l’intérêt de cette innovation est difficilement perceptible car la société civile est déjà représentée à la chambre de l'application des peines en appel, sa composition étant désormais élargie, en plus des trois magistrats professionnels, à deux personnes : un responsable d'une association d'aide aux victimes et un responsable d'une association de réinsertion des condamnés.

Nous ne comprenons pas la nécessité d'introduire des citoyens assesseurs non spécialisés. Nous le comprenons d’autant moins que la pratique de l’application des peines est une matière très complexe, qui suppose des compétences techniques et un suivi de la personne détenue. Les citoyens assesseurs auront évidemment le plus grand mal à s'intégrer dans un processus de suivi et d'évaluation d'un détenu, ce qui demande une culture à la fois juridique et pénitentiaire et ne se construit pas en quelques heures de formation.

À la différence de la détermination de la lourdeur d'une peine, qui fait appel à des notions morales et qui renvoie à des valeurs sociales dont chaque citoyen a vocation à être le porteur et l'interprète, la décision de libération conditionnelle s'appuie nécessairement sur des savoirs criminologiques, juridiques, sociologiques, médicaux et psychiatriques.

En bref, nous ne voyons qu'une seule raison à l'introduction de tiers dans le domaine de l’application des peines : la volonté de rendre plus difficiles les libérations conditionnelles, alors que la libération conditionnelle, bien encadrée, est un facteur de prévention de la récidive.

La mise en place progressive de ces nouvelles dispositions relatives aux citoyens assesseurs, telle que prévue à l'article 31 du projet, pose enfin la question de l’égalité des citoyens. Deux cours d’appel appliqueront le dispositif à titre expérimental en juillet 2012, dix au plus tard au 1er janvier 2014. À quelques kilomètres de distance, pour des faits identiques, des personnes pourront être jugées devant des formations différentes en attendant la généralisation de la procédure sur l'ensemble du territoire.

Si le débat peut exister sur le point de savoir si une telle expérimentation est rendue possible ou non par l’article 37-1 de la Constitution, il semble en tout cas évident que le choix de l’expérimentation ne vise rien d’autre qu’à concilier l’obligation de respecter la volonté présidentielle d’instituer le dispositif dès 2012, et l’obligation de dégager les importants moyens budgétaires qu’imposerait la généralisation immédiate.

Concernant le jugement des crimes et la composition de la Cour d'assises, je veux d’abord souligner l’incohérence de la version initiale du projet, même si celle-ci a un peu évolué depuis le début de la discussion parlementaire, au point que sur ce plan trois versions coexistent : celle du Gouvernement, celle du Sénat, et celle de notre commission des lois.

Avec la Cour d'assises simplifiée telle qu'elle était proposée par le Gouvernement, la composition de la juridiction destinée à juger les crimes était la même que celle destinée à juger les délits. Les infractions, qu'elles soient qualifiées de délit ou de crime, seraient toutes poursuivies, introduites et renvoyées selon la même procédure et sur le fondement des mêmes règles d'audiencement devant des instances différenciées par leur seul nom. La Cour d'assises classique, en sa formation actuelle, serait dès lors devenue exceptionnelle et imposée aux accusés poursuivis en état de récidive légale ou pour les crimes passibles d'une peine de réclusion criminelle supérieure à vingt ans.

En proposant un tel dispositif, le Gouvernement a introduit une différenciation en fonction de la qualité de l'auteur et non en fonction de l’infraction. Pour lutter contre la pratique de la correctionnalisation, le Gouvernement proposait ainsi de faire juger la grande majorité des crimes comme s'il s'agissait de délits, de mettre en place une forme de correctionnalisation des assises, et comme le souligne très justement le Syndicat de la magistrature, en quelque sorte, on correctionnalise au nom de la lutte contre la correctionnalisation.

Ces assises simplifiées n'ont pas rencontré l’accord du Sénat, qui a préféré une réduction du nombre de jurés, sans distinction des catégories de crimes. Mais notre commission des lois a repris l'inspiration du texte initial avec la création d'une formation simplifiée de la Cour d'assises, composée de trois magistrats professionnels et de trois jurés. Outre le problème d'inconstitutionnalité posé par cette disposition – problème que le Gouvernement a lui-même soulevé, mais qui existe aussi pour la disposition qu’il avait proposée –, ce détricotage du dispositif de la justice en matière criminelle ne réglera pas le problème de la correctionnalisation et, en définitive, le nombre de jurés aux assises sera diminué, ce qui entraînera une moindre représentation de la société. Ce n'est pas, vous l'avouerez, le moindre des paradoxes de ce texte.

Mme Delphine Batho. Exactement !

M. Marc Dolez. J'aborde maintenant le troisième et dernier volet du projet de loi relatif à la justice des mineurs, sur lequel mon collègue Michel Vaxès reviendra plus particulièrement dans son intervention. Je veux cependant, d'ores et déjà, faire part de notre opposition résolue aux dispositions proposées, qui conduisent à vider de leur sens les principes de priorité éducative et de spécialisation de la procédure applicable aux mineurs. Comme le déplore l'Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille : « le projet de loi achève la déconstruction de l'ordonnance de 1945 et la consécration d'une justice des mineurs qui ne s'intéresse plus qu'aux actes commis par ces derniers et non plus à l'évolution durable d'une personnalité en construction ».

Nous ne comprenons pas la nécessité de procéder à une énième réforme ponctuelle de l'ordonnance de 1945, qui ne sera que la trente-cinquième, alors même que tout le monde s'accorde sur le fait que ces modifications nuisent à la lisibilité et à la cohérence de l'ordonnance et contribuent à un état d'insécurité juridique, tant pour les professionnels que pour les justiciables.

Nous ne comprenons pas non plus le caractère urgent d'une telle réforme, alors qu'un code de la justice pénale des mineurs est en préparation depuis 2008, et que vous nous dites, monsieur le garde des sceaux, qu'il est « quasiment achevé ».

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à être dubitatifs, puisque, comme nous, tous les professionnels s'interrogent sur les raisons pour lesquelles on modifie les textes applicables aux mineurs, en urgence, partiellement et sans lisibilité d'ensemble. Vous avez répondu, monsieur le garde des sceaux, devant la commission des lois. que « le terme très proche de la législature » ne permettait pas d'envisager dans l'immédiat la discussion du code de la justice pénale des mineurs. C'est donc bien le calendrier électoral qui justifie cette réforme partielle. C'est là aussi tout simplement inadmissible, tant sur la forme que sur le fond.

Votre réforme vise à supprimer un droit pénal spécifique pour les mineurs. Les dispositions du projet de loi tendent à nier aux mineurs délinquants leur statut d'enfant, d'enfant « particulièrement vulnérable » selon le Comité des droits de l'enfant des Nations unies, et qui bénéficient, à ce titre, de droits spécifiques en justice : spécificité des juridictions et procédures, traitement éducatif adapté avant tout, détention comme mesure de dernier ressort.

En proposant de mettre en œuvre une justice plus expéditive, axée sur la seule sanction pénale, le texte porte gravement atteinte à ces principes car, comme le souligne très justement la Défense des Enfants Internationale : « Ces jeunes ont besoin d'une prise en charge rapide et d'un accompagnement humain, pas d'une condamnation rapide et encore moins d'un enfermement plus fréquent. »

C'est ainsi que la création d'un tribunal correctionnel pour mineurs, qui statuera dans des délais plus brefs que le tribunal pour enfants, conçu pour les mineurs récidivistes de plus de seize ans, porte atteinte au principe fondamental d'une juridiction spécialisée pour les enfants et devient de fait une juridiction d'exception pour les adolescents de seize à dix-huit ans.

De plus, la composition de cette juridiction ne garantit en rien la spécialisation de la justice des mineurs puisqu'un seul juge des enfants est appelé à y siéger aux côtés de deux magistrats non spécialisés. Plus inquiétant encore, deux jurés citoyens pourront, dans le cadre des infractions visées à l’article 2 du projet de loi, composer cette juridiction, à l'instar du tribunal correctionnel pour majeurs.

De ce fait, alors que la spécialisation de la juridiction des mineurs est assurée au tribunal pour enfants par la présence de deux assesseurs choisis pour l'intérêt qu'ils portent aux questions de l'enfance et par leurs compétences, cette garantie disparaît purement et simplement : les assesseurs sont remplacés par des citoyens, dont il n'est absolument pas exigé un quelconque intérêt pour les problématiques spécifiques des mineurs.

En réalité, la création du tribunal correctionnel est une nouvelle tentative d'aligner le traitement des mineurs sur celui des majeurs et de parvenir à un abaissement déguisé de la majorité pénale.

Le projet prévoit également la convocation par officier de police judiciaire à comparaître devant le tribunal pour enfants et permet ainsi la saisine directe de cette juridiction, alors même que le Conseil constitutionnel a censuré, le 10 mars dernier, une disposition analogue de la LOPPSI 2, qui prévoyait que le Procureur de la République pouvait faire convoquer directement un mineur par un OPJ devant le tribunal pour enfants, sans saisine préalable du juge des enfants. Il s'agit là encore d'une disposition qui porte atteinte au principe fondamental de spécificité de la justice pénale des mineurs, reconnu par les lois de la République et par les engagements internationaux ratifiés par la France. Le recours accru au placement en centre éducatif fermé des délinquants de moins de seize ans, l'assignation à résidence sous surveillance électronique mobile des mineurs de treize ans, la stigmatisation des parents de mineurs délinquants, l'instauration d'un dossier unique de personnalité sous le contrôle du Parquet sont autant de mesures que nous refusons.

L’idéologie sécuritaire nous enferme dans un cercle vicieux de répression, alors que les professionnels ne manquent pas d’outils juridiques répressifs, mais plutôt de moyens pour faire correctement leur métier et mettre à exécution les décisions qu’ils croient bonnes.

Ce n’est pas d’une nouvelle réforme que ces professionnels ont besoin, mais de moyens en personnels, en temps, en places disponibles dans des structures, en possibilités d’insertion professionnelle. Là est la véritable urgence, et ce texte n’y répond pas. C’est pourquoi nous le combattons. C’est aussi pourquoi, dans la discussion des articles, nous défendrons des amendements de suppression et des amendements destinés à combattre les régressions introduites depuis dix ans dans la justice des mineurs.

Vous l’aurez compris, monsieur le garde des sceaux : les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche sont farouchement opposés à ce projet qu'ils jugent inutile et inquiétant ; un projet qui, pour reprendre, monsieur le garde des sceaux, l’expression de l'un de vos illustres prédécesseurs, « relève du populisme judiciaire ».

Notre assemblée s’honorerait à le rejeter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

 

 

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